À propos

Salut,

Dans les parties que je mène, j’ai un « propos ». C’est-à-dire qu’il y a un message, une morale, une intention ; j’essaye de mettre un sens à la trame générale de l’histoire que vivent les personnages.
Par exemple dans ma partie de Cthulhu, le propos (très lovecraftien) était que l’Homme n’est qu’une poussière insignifiante prise dans un univers qui le dépasse : un dépassement de ses sens, mais également de sa temporalité et dont la seule prise de conscience amène à la folie ou à la mort. Les personnages sont condamnés et ils sont sans espoir.

C’est une version assez différente de ce que je pratiquais avant où je mettais en scène des situations périlleuses, aventureuses, marrantes, tristes, etc. Les personnages vivaient une série de choses que j’essayais de rendre cohérente et chouette à jouer, mais il n’y avait pas de propos. Je n’essayais pas de dire quelque chose.

Est-ce que vous avez un propos dans vos parties ?

Non, mais certains jeux auxquels je joue cherchent à explorer des sujets de societé (racisme, feminisme, passage à l'age adulte...). Lorsque ça emballe les joueurs j'ai plaisir à le faire. Pas pour faire passer un message mais plutôt pour se mettre à la place de quelqu'un qu'on n'est pas/ n'est plus.

Je suis assez proche de la position d'Akanon, dans le sens où je joue de plus en plus de jeux "émergents" (des jeux dans lesquels le contenu n'est pas écrit mais où l'auteur donne des clés, des mécanismes ludiques, qui permettent de créer dans une certaine direction, d'une certaine manière). Par exemple, Prosopopée, de Frédéric Sintès, "oblige" à créer dans une direction (le zen, le contemplatif, la résolution pacifique des problèmes, le retour à l'équilibre entre l'homme et la nature) par les mécaniques qu'il met en place (on ne se coupe pas la parole, le silence n'est pas gênant et souvent bienvenu, on crée à partir de ce que l'autre pose, la méthode de résolution implique de résoudre le problème narrativement, en mettant des solutions en place.

Après, ça m'arrive de me dire dans un jeu type Apocalypse World: tiens, aujourd'hui, j'ai envie de parler de ce thème-là (faire partie d'un groupe, le sexisme, la dureté de la guerre, etc.). Et de plus en plus, c'est important pour moi de réfléchir à ce qui se raconte (parce que même quand tu ne fais "que" t'amuser, tu présentes une vision du monde, tu parles des gens, de la société, tout ça tout ça ^^ ). Mais le tout en prenant garde à ce que ça reste un jeu, un bon moment pour les participants, et un jeu de rôle, où tous les participants créent une histoire ensemble. Attention à ne pas tomber dans la conférence ou l'histoire toute écrite pour délivrer la morale que le mj veut

Je comprends bien le risque « de la démonstration » du meneur de jeu qui veut imposer un message ou une vision au détriment du plaisir de jeu ou de la co-construction de l’histoire. Au contraire, j’ai l’impression que les jeux de rôle « bac à sable » permettent d’autant plus d’amener un propos. Actuellement, la diversité des mécanismes de jeu, la souplesse des interactions et la richesse des univers proposés renforcent la capacité à faire vivre quelque chose.

J’éprouve plus de plaisir à créer un scénario avec un thème qui me touche et je crois qu’il y a potentiellement nettement plus de profondeur dans ce genre de scénario « à thèse ». Un peu à la manière d’une série qui gagne en intérêt quand elle explore des thèmes universels. Le bon exemple récent est GoT avec les relations familiales, en particulier chez les Lannister. Plein de ressorts scénaristiques viennent directement de l’ambition qu’à Cersei pour ses gosses ou la haine entre Tyrion et Tywin. Bien entendu, ça peut être une simple toile de fond, mais une exploration plus fine, voire une thèse est plus capable d’être intéressant pour les joueurs.

En choisissant Cthulhu pour un propos sur l’insignifiance de l’être humain, j’ai pas l’impression que je n’ai floué personne. Idem, en choisissant GoT le jeu de rôle pour explorer la thématique de la trahison, je crois aussi qu’il y a moyen de tenir un propos fort sur le sujet sans nuire au plaisir de jeu.

Il y a pas mal de thèmes à explorer dans GoT : les relations familiales mais aussi le thème - constant dans les bouquins - de la manipulation ou le rejet social du "bâtard", par exemple. La quête du Pouvoir au détriment de toute autre valeur est aussi un excellent thème.

Ceci dit, si j'explore tous ces thèmes durant mes parties, je ne rédige pas un scénario en me disant : bon..là, je vais les faire réfléchir sur tel ou tel thème". J'essaie d'abord de construire quelque chose de ludique et qui correspond à l'esprit de ma campagne.

Je pense qu'un thème n'est qu'un rail de narration comme un autre.

Je peux en utiliser ou pas. Mais ce n'est pas une préoccupation.

pour avoir été joueur à la partie de
Je peut dire que c'était très sympas d'avoir participer à cette façons de maitriser et que j'ai très bien sentis le coté grain de poussières cosmique.

Merci encore au MJ